Bonjour à tous!

        Pourquoi les animaux n'ont pas de sépultures?

        N'est-ce pas à cause da la malédiction de Crapaud?

        Qui est Crapaud là même?

     N'est-ce pas c'est cette canaille à la peau galeuse qui habite les mares et se nourrit d’insectes morts, ou encore des larves au berceau? Cette canaille dit-on, jadis dans ses mains tenait le secret de tous les animaux.

        N’est-ce pas tout le monde craignait et respectait Crapaud pour cela?

        C’était Crapaud. La petite bête à la peau verruqueuse, la peau galeuse sous laquelle il circule. Oui, il circule le poison du crapaud. Ce poison qui était le bonheur, ce poison qui était l’eau du salut est aujourd’hui signe de malédiction.   Car la peau du crapaud était le gage de l’immortalité des autres animaux.

        N’est-ce pas la terre hébergeait alors deux crapauds ? Le crapaud-fils et sa mère séculaire. La mère de crapaud vint à mourir.  Le vénérable crapaud-fils dans cette hébétude où le deuil aveugle l’avait jeté sonna le tam-tam pour annoncer en toute diligence à la gent à queue, poilue, qui sautille, et à la gent à quatre pattes, que lui crapaud venait de perdre sa mère.

     Comme l’éclair d’un instant que lance la tornade du ciel, la nouvelle dans la brousse au son dur du tam-tam funèbre remplit les oreilles et rassembla les gens du pays à la cour de la défunte. Tous les animaux étaient là, de l’intrépide et orgueilleux lion à la sage et misérable Tortue. Tous, ils étaient là, au deuil de la mère du crapaud.

   L’éléphant interrogea.

   « De Lion à Tortue, animaux à ongles ou à griffes, appréciez-vous ma parole » ? éee,éeee,eeee !

   -La bouche que nos pères ont nourrie de la kola amère et du sauvage piment des vipères, la bouche qui ignore le mensonge et les vils détours du farceur adresse à tous cette parole.

   - Qu’entendez-vous grands de la forêt ? Je n’étais pas à l’eau, mais mes pieds sont mouillés ?

  (Ici, il y a toujours une raison à la mort d’un être .On tint la palabre funèbre où il fallait donner les raisons de la mort de mère Crapaud)

   - Ce grand arbre s’est écrasé sur le sol par la suite de quel vent ?

   - Tornade ou tempête, qui a déraciné le palmier à huile ?

   - Crapaud-fils, ta mère est morte. D’où vient la mort ? »

     La cour était sombre dans le morne trouble de la mort et les grands méditaient les sages paroles de l’éléphant. On voulait entendre la palabre.On voulait connaitre la raison de la mort de Crapaud sous la peau de qui circulait l'eau du bonheur.

    « Père Eléphant, dit le Crapaud-fils, depuis un jour, ma mère est morte !

Il y a plus fort que nous. Faisons vite ; enterrons la d’abord, foi de ma bouche, je vous raconterai sa vie »

     N'est-ce pas la palabre prit le dessus sur la sagesse?

    La cour s’indigna, le roi Lion sur sa chaise effroyable, écumait de colère. Les bénéficiaires du sang des chèvres, escorte du lion et des maîtres Panthères et Léopards râlaient contre l’impertinence de la jeunesse, qui se mêle effrontément de faire la morale aux anciens !

   -Quel plus grand peut-on craindre sinon Lion le Roi ?

   -Quel plus puissant que père Eléphant ?

    Sur ces entrefaites arrive un bataillon de fourmis soldats.

    Insectes à grosse tête noire, aux yeux exorbités qui ont pour dents, deux pinces tranchantes, plus minces que des épingles et qui dans leur fureur n’épargnait ni larve, ni lion. Elles entrèrent dans la crinière de Lion, de Panthère et de Léopard.

    Elles s’agrippèrent autour du cou de père Eléphant, lui bouchèrent les oreilles qu’elles prenaient pour un gouffre dans un rocher. Les petites gens eurent tôt leur compte réglé et plus personne n’attendit, ni discussion, ni enterrement. Les griffes du Lion mordaient sa propre chair. L’éléphant se traînait dans sa bave sur le sol répandue où il cherchait quelque soulagement.

     Les fourmis piquaient le temps d’ouvrir la paupière et de la refermer sur la pupille, la cour s’était vidée de tous les héros de la brousse.

    Seul au milieu des redoutables fauves, le cadavre de mère crapaud gisait. Les fourmis étaient restées maîtresses du corps du premier animal mort. Elles rongèrent la peau jusqu’aux os, et n’abandonnèrent la dépouille que fort tard.

Le lendemain de nouveau, la gent animale était présente au lieu du carnage de la veille. Du creux d’un ravin, profond, où il s’était caché, crapaud-fils sortit sinistre et sombre comme un revenant le premier cette fois, il adressa la parole aux grands de la forêt.

    -Père Eléphant le grand ! Panthère, Léopard ! Tortue la sage !, je vous en prie,    l’homme fragile sur ses deux pattes se méfie du froid ver de terre. Frêle comme un bourgeon de macabo, c’est lui qui fait trembler la forêt par ses ruses.

  Vous les forts, vous les sages dites-moi où est le corps de ma mère ?

Si elle donc que respectait la jungle n’a pas connu de sépulture, de par ma bouche, jusqu’à la fin des temps,  jamais plus animal sous les bois ne connaîtra à sa mort les honneurs de la sépulture.

    Depuis ce temps, comme dans la savane jaune d’herbes sèches, où le feu se répand avec férocité, la malédiction de crapaud-fils jamais n’a connu de limite.

    IMAGES DU NET

    (ELEPHANT DE DANY)

     Un Conte de Léon Marie AYISSI NKOA

     Dans Les Contes et Berceuses du Cameroun

 Bonne journée à tous!